Obsolescence programmée : Que dit la Loi ?

Obsolescence programmée :
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Par Audrey BERGAMINI Lu 10572 fois Publié le : 24/03/2020 Publié le : 24/03/2020



L'obsolescence programmée se définit par "l'ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d'un produit pour en augmenter le taux de remplacement".

Le législateur a en effet souhaité protéger les consommateurs des industriels. Une protection inscrite dans la loi. Elle doit être distinguée du vice caché

Vers une protection du consommateur contre l'obsolescence programmée

L'essentiel.

Ce que dit la loi :

  • L'article L 441-2 du code de la Consommation donne la définition de l'obsolescence programmée et en interdit la pratique.

  • L'article L 454-6 du code de la Consommation énumère les sanctions applicables.
     


| CADRE & PRINCIPES |

Une législation récente


C'est en août 2015 que la France a légiféré avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Cette loi a créé l'article L 213-4-1 du code de la consommation qui donne la définition de l'obsolescence programmée. Un article du code aujourd'hui abrogé et remplacé en 2016 par l'article L 441-2, toujours en vigueur.

C'est l'Union Européenne qui la première s'est questionnée sur l'obsolescence programmée. Dès 2013, le Comité Economique et Social Européen a demandé d'interdire les produits contenant des défauts incorporés et conçus pour mettre fin prématurément à la vie du produit.
Le Parlement Européen a voté en juillet 2017 une résolution pour "une durée de vie plus longue pour les produits : les avantages pour les consommateurs et les entreprises".

 

Principe

L'objectif du législateur en matière d'obsolescence programmée est double : protéger le consommateur et protéger l'environnement.

Protection du consommateur


On considère que 80% des produits qu'ils soient électriques ou électroniques, sont concernés par l'obsolescence. Le phénomène n'est pas nouveau et est apparu dans les années 20. Des sociétés ont mis au point un système permettant de limiter la durée de vie des ampoules et imposant leur remplacement. C'est un système d'économie linéaire (extraire, fabriquer, consommer, jeter) qui s'est mis en place. Les produits sont fabriqués en grande série et les prix diminuent.

L'obsolescence programmée se caractérise à la fois par la fragilité du produit, mais aussi par le manque de pièces pour la réparation. Une fin de vie des produits et logiciels programmés, incitant les consommateurs à racheter de nouveaux modèles, parfois plus chers. 

De nos jours, la société de consommation est quelque peu remise en cause. Un modèle économique circulaire s'impose de plus en plus. Il est demandé aux entreprises de créer des produits durables dans le seul but de limiter la consommation. 

Désormais le consommateur doit obtenir une information réelle sur le produit ou service qu'il achète.

Protection pour l'environnement


Limiter la consommation, c'est aussi limiter le gaspillage des ressources. C'est pourquoi notre société est en train de plus en plus de restreindre le modèle économique linéaire lui préférant un modèle circulaire. 

Un des axes du programme national de prévention des déchets en collaboration avec l'ADEME (Agence de la transition écologique) concerne la lutte contre l'obsolescence programmée pour permettre d'augmenter la durée de vie des marchandises.

Il apparaît que les lois qui régissent l'obsolescence programmée sont des lois sur l'écologie :

  • La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte

  • La loi du 10 février 2020 (qui définit les sanctions) relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire.

Cette dernière loi de 2020 énonce très clairement ses objectifs de revenir à une économie circulaire et de répondre à des questions environnementales.
 


| PROCÉDURE |


L'article L 454-6 du code de la consommation considère que l'obsolescence programmée est une fraude.
 

Sanction en cas d'obsolescence programmée

L'obsolescence programmée est une tromperie punie d'une peine pouvant aller jusqu'à deux ans d'emprisonnement et 300 000 € d'amende.
Cette amende peut être augmentée de manière proportionnelle aux avantages tirés du délit à 5% du chiffre d'affaires annuel calculé sur les trois dernières années.

Les personnes physiques encourent des peines complémentaires prévues au code pénal. Il s'agit de l'interdiction :

  • D'exercer une fonction publique, une fonction professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

  • D'exercer une profession commerciale ou industrielle, d'administrer ou de gérer une entreprise commerciale ou industrielle.

Les deux interdictions peuvent être cumulées.
 

Application restrictive


L'application des articles L 441-2 et L 454-6 du code de la consommation peut être compliqué dans la pratique. La difficulté résidera dans l'établissement de la preuve. Il pourra être nécessaire de mettre en œuvre des moyens techniques long et coûteux afin de prouver l'obsolescence programmée.

Il est possible de penser qu'il s'agit d'une application restrictive et quasiment inapplicable, voire inefficace pour un simple particulier. Pour intenter une action judiciaire, il sera plus facile de le faire en groupe ou par le biais d'une association.

Trois procédures en France


À ce jour, seulement trois procédures ont été lancées en France à l'initiative de l'association HOP (Halte à l'obsolescence programmée) :

  • En février 2017 une première plainte est déposée contre les quatre leaders de fabricants d'imprimantes, mais qui s'est finalement concentrée sur EPSON. L'association leur reproche de réduire la durée de vie des imprimantes et de leurs cartouches d'encre. 

  • En décembre 2017, l'association HOP a engagé une action contre APPLE. Les utilisateurs notaient un ralentissement de leur téléphone après les mises à jour.

  • En décembre 2019, une nouvelle plainte était déposée contre AMAZON pour le non-respect de l'information des consommateurs en matière de garantie légale de conformité.

Sur ces trois procédures, une seule a donné lieu à un résultat. APPLE a été condamné par la Direction Générale de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) à payer 25 millions d'euros d'amende pour "pratiques commerciales douteuses".
La DGCCRF considère qu'il s'agit d'un défaut d'information sur le risque lié à la mise à jour. En revanche il n'y aura pas d'indemnisation des clients lésés. Chacun devra faire une demande de dommages et intérêts.

Impact


Ces procédures sont la preuve qu'une action individuelle pour obsolescence programmée peut être très compliquée à titre individuel. Les poursuites ne se font et se feront que collectivement ou par le biais d'association.

En revanche, ces procédures ont eu un impact positif sur la conception des appareils électroniques. On peut parler d'écoconception, car les entreprises s'engagent sur la durabilité et la réparabilité.
À compter de 2021 les consommateurs seront d'ailleurs informés de la réparabilité avec la mise à disposition d'un indice de réparabilité. Dès 2024, c'est un indice de durabilité qui informera les consommateurs sur la durée de vie des produits.
Des éléments avec ceux déjà existants qui informeront au mieux les consommateurs sur leurs achats, la durée de vie des produits, la mise à disposition des pièces détachées, etc.

 

Vos questions | nos réponses

Comment est sanctionnée l’obsolescence programmée ?

Le particulier ou l’entreprise peut être condamné à une amende mais aussi par des sanctions pénales telles qu’une peine de prison et des interdictions d’exercer.

Comment prouver l’obsolescence programmée ?

Cela peut être délicat pour un simple particulier car il faut des moyens techniques qui peuvent être coûteux et des procédures longues. Les seules procédures en France ont été mise en œuvre par une association.

Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ?

L’article L 441-2 du code de la consommation définie l’obsolescence programmée par "l'ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à réduire délibérément la durée de vie d'un produit pour en augmenter le taux de remplacement".