Lorsqu’un locataire quitte un logement, la question des dégradations est souvent source de tensions. Que peut-on lui imputer ? Quelles réparations doivent être prises en charge par le bailleur ? Et comment distinguer une usure normale, due au temps, d’une dégradation résultant d’une négligence ? C’est l’article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, complété par le décret n° 87-712 du 26 août 1987, qui encadre cette répartition des responsabilités.
Qu’est-ce qu’une dégradation locative ?
Une dégradation locative se définit comme une dégradation causée par le locataire* à un bien mis en location (par exemple la négligence locative), qu’il faut distinguer de la vétusté qui renvoie à l’usure normale.
*Le locataire est responsable des dégradations locatives.
Dégradation locative : définition
La dégradation locative trouve sa définition dans l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989. Il s’agit de toute dégradation causée par le locataire qui n’entretient pas ou néglige le lieu d’habitation qu’il loue.
💡Parmi les obligations du locataire figure notamment celle de prendre à sa charge l’entretien courant du logement et des équipements mentionnés au contrat, les menues réparations ainsi que l’ensemble des réparations locatives (art. 7 de la loi du 6 juillet 1989).
La liste des réparations qui incombent au locataire figure en annexe du décret n° 87-712 du 26 août 1987.
Qu’est-ce que la négligence locative ?
La négligence est l’absence de diligence dans l’exécution des obligations contractuelles ou légales. Elle peut être passive (ne pas aérer, ne pas entretenir) ou active (usage dégradant des lieux).
Constituent des exemples typiques de négligences locatives :
- Murs jaunis par le tabac ;
- Douches bouchées par des cheveux non nettoyés ;
- Frigo laissé sale ou moisi à la sortie ;
- Tapisseries arrachées ;
- Parquet détérioré par de l’eau stagnante.
Différence entre vétusté et dégradation locative
Tandis que la dégradation locative renvoie à tout ce qui est causé par un manque d’entretien ou par la négligence du locataire, la vétusté renvoie à l’usure normale du bien par l’effet du temps. À la différence de la vétusté, la dégradation locative suppose une négligence ou un manque d’entretien.
Par exemple, la vétusté apparaît de manière classique après 10 ans de location sur les équipements et revêtements les plus sollicités, comme les peintures murales, les moquettes, les joints de salle de bain.
💡La grille de vétusté, souvent annexée au contrat de bail, fixe une durée théorique d’usage pour chaque élément du logement. Elle permet d’éviter que le locataire soit tenu pour responsable d’une usure normale due au temps.
Comment répartir la charge des dégradations ?
Pour répartir la charge des dégradations, il convient de distinguer celles imputables au locataire de celles relevant du propriétaire.
Les travaux imputables au locataire
D’après l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 et l’annexe du décret du 26 août 1987, les dégradations et travaux imputables au locataire sont les détériorations qui ne résultent pas :
- de la vétusté (usure normale) ;
- d’un cas de force majeure (événement extérieur, imprévisible et irrésistible) ;
- ou d’un vice de construction.
Il s’agit donc de dégradations causées par une négligence, une absence d’entretien, ou un usage anormal du logement ou de ses équipements.
Dès lors, le locataire peut se voir imputer les travaux en matière de :
- portes et fenêtres (ouvertures) concernant notamment les poignées, les serrures ou encore le graissage des gonds ;
- murs, sols et plafonds concernant le rebouchage des trous, le nettoyage des traces ou le remplacement des lames de parquet abîmées ;
- sanitaires (détartrage des WC, changement de flexible, remplacement des joints) ;
- plomberie (dégorgement des canalisations, remplacement des clapets) ;
- électricité (remplacement d’ampoules, interrupteurs, fusibles) ;
- espaces extérieurs (taille des haies, tonte, enlèvement de mousse sur les terrasses).
💡 En cas de dégradations volontaires du locataire (graffitis, destruction, violences…), le bailleur peut :
- Porter plainte pour délit de dégradation de bien d’autrui (art. 322-1 du Code pénal) ;
- Demander réparation devant le juge (art. 1240 du Code civil).
⚠️ En cas de salissures extrêmes, moisissures non traitées, présence d’ordures ou de nuisibles, le logement est insalubre. Le bailleur peut faire constater l’état du logement, exiger réparation, voire faire intervenir les services d’hygiène municipaux.
Les dégradations relevant du propriétaire
Tout ce qui ne relève pas de l’annexe du décret du 26 août 1987 incombe au propriétaire. Cela renvoie notamment aux grosses réparations qui concernent notamment la structure et la solidité de l’immeuble loué (art. 606 du Code civil).
Comment récupérer les sommes dues ?
Pour récupérer les sommes dues, le propriétaire pourra conserver tout ou partie du dépôt de garantie (à tort appelé « caution »)*. L’assurance peut également couvrir certains dégâts.
*La caution renvoie à une sûreté personnelle consentie par une personne (la caution) au profit d’un débiteur, la caution s’engageant à payer en cas de défaillance de ce dernier (art. 2088 du Code civil).
💡Il est simplement possible avant tout de mettre en demeure le locataire ou sa caution de payer.
Qu’est-ce que le propriétaire peut retenir sur la caution ?
Le propriétaire peut retenir tout ou partie de la somme du dépôt de garantie (appelé « caution » à tort dans le langage courant), selon l’ampleur des dégradations.
💡Néanmoins, le bailleur est tenu de justifier* de la somme qu’il retient (art. 22 al. 3 et 4 de la loi du 6 juillet 1989).
*Il peut justifier par devis ou factures.
L’assurance peut-elle payer les dégradations locatives ?
L’assurance habitation couvre certains dégâts matériels (ex. dégâts des eaux), mais pas toujours les dégradations causées par négligence.
Le bailleur peut souscrire une assurance propriétaire non-occupant (PNO) ou une garantie des loyers impayés (GLI) incluant une protection contre les dégradations.
Comment constater les dégradations locatives ?
La constatation des dégradations locatives se fait notamment lors de l’état des lieux en comparant celui d’entrée et celui de sortie, un expert peut également constituer un appui solide pour prouver une dégradation.
L’état des lieux
L’état des lieux d’entrée et l'état des lieux de sortie, réalisés contradictoirement (c’est-à-dire en présence du locataire et du propriétaire), permettent une comparaison objective. Ils doivent être datés, signés, détaillés, pièce par pièce (art. 3-2 de la loi du 6 juillet 1989).
💡Que se passe-t-il en l’absence d’état des lieux d’entrée ? Sauf preuve contraire apportée par le locataire, le logement est présumé avoir été remis en bon état (article 1731 du Code civil). Le locataire pourrait alors être tenu responsable de toutes les dégradations constatées (art. 3-2 de la loi n° 89-462).
Recourir à un expert
En cas de litige ou de désaccord sur la nature et l’origine des dégradations, le recours à un expert immobilier ou à un huissier de justice peut s’avérer utile. L’expert évalue objectivement l’état des lieux, identifie l’origine des dommages et peut établir un rapport technique circonstancié. Ce document servira de preuve en cas de procédure judiciaire ou amiable.
Comment prouver une dégradation ?
Pour prouver une dégradation, le bailleur doit rapporter l’existence et l’origine des dégradations (art. 1353 du Code civil). Pour y procéder, il peut passer (art. 1358 du Code civil) :
- Par comparaison des états des lieux ;
- Par photos ;
- Par devis ;
- Par témoignages si nécessaire.
Le locataire peut contester en démontrant (art. 1353 al. 2 du Code civil) :
- Que la dégradation existait déjà ;
- Qu’elle résulte de la vétusté ;
- Qu’il s’agit d’un cas de force majeure.
Quelles sont les charges imputables au locataire ?
Le locataire est tenu de régler les charges dites « récupérables », qui couvrent essentiellement, l’entretien courant du logement, les réparations locatives listées par le décret n° 87-712 du 26 août 1987, les charges d’usage collectif (article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989).
