Nullité d'une ordonnance d'injonction de payer : Motifs et recours

Nullité d'une ordonnance d'injonction de payer :
Thèmes :
recouvrement judiciaire, injonction de payer
Par Audrey BERGAMINI Lu 5367 fois Publié le : 03/11/2022 Publié le : 03/11/2022


L’ordonnance d’injonction de payer (IP) est une décision de justice obtenue après le dépôt d’une requête auprès du Juge compétent. Pour appliquer l’ordonnance et recevoir le paiement de son impayé, le demandeur doit la faire signifier au débiteur. À défaut, l’ordonnance peut être nulle. De la même manière, l’acte de signification doit comporter certaines mentions obligatoires.



L’ESSENTIEL

➜ Ce que dit la loi : l’article 1411 du Code de procédure civile précise qu’une ordonnance d’injonction de payer non signifiée devient non-avenue. Par ailleurs, l’article 1413 du Code de procédure civile détaille les mentions obligatoires dans l’acte de signification. Dans le cas contraire, celle-ci est frappée de nullité. 

➜ Délai pour agir : la signification de l’ordonnance d’injonction de payer doit se faire dans un délai de 6 mois à compter de sa date.

➜ Procédure simplifiée : le créancier qui reçoit la décision doit se charger de la faire signifier par un officier ministériel. C’est un commissaire de justice qui va donc s'en occuper. Vous avez une créance impayée ? Vous souhaitez obtenir une ordonnance d’injonction de payer ? Litige.fr vous accompagne tout au long de la procédure judiciaire pour le recouvrement de vos créances.

INJONCTION DE PAYER EN LIGNE

I - L’information du créancier par le greffe du Tribunal compétent

L’ordonnance portant injonction de payer ne donne pas lieu à une audience. Ni le créancier ni le débiteur ne peuvent exposer les éléments du dossier au Juge du Tribunal compétent (civil ou commercial). Elle a pour caractéristique d’être non contradictoire, car le Juge rend sa décision sur les documents apportés par le seul créancier (contrat, facture, tous documents qui justifient de la créance).

Le créancier doit donc être informé des suites de sa requête en injonction de payer. Pour cela, le greffe lui adresse une copie certifiée conforme de l’ordonnance.  

II - L’obligation de signification de l'ordonnance portant injonction de payer 

L’article 1411 du Code de procédure civile précise que la copie certifiée conforme de l’ordonnance d’injonction de payer est signifiée à tous les débiteurs. C’est le créancier qui en prend l’initiative. 

2.1 - Quel est le délai pour la signification de l’acte au débiteur ?

C’est l’article 1411 du Code de procédure civile qui précise le délai. Il est de 6 mois à compter de la date de l’ordonnance d’injonction de payer. 

À défaut, la loi ajoute que la décision est non-avenue. Le créancier ne pourra pas obtenir le paiement de sa créance et ne pourra pas agir contre son débiteur. Cela peut arriver lorsque le Tribunal n’a retenu qu’une partie de la requête. Cependant, le demandeur devra faire attention que le délai de prescription l’empêche d’engager une autre procédure contentieuse de recouvrement (référé provision ou assignation).

2.2 - Qui se charge de l’acte de signification ?

C’est le commissaire de justice (anciennement huissier de justice) qui se charge de sa rédaction et de le signifier. 

Le créancier ou son mandataire (un avocat, par exemple) lui ont transmis l'ordonnance. Il peut avoir déposé la requête au nom de l’entreprise créancière. Dans ce cas, c’est le commissaire de justice qui reçoit directement l’ordonnance et avise son client des suites à donner.

2.2.1 - Quelles sont ses mentions obligatoires ?

L’article 1413 du Code de procédure civile détermine les mentions obligatoires de cet acte signifié à la partie redevable. Celles-ci s’ajoutent aux mentions prescrites de l’article 648 du CPC (date, identité et coordonnées du requérant, le nom et les coordonnées du commissaire de justice, les coordonnées du destinataire).


Ce sont : 

  • La sommation de payer au créancier la somme indiquée dans l’ordonnance à laquelle s'ajoutent les frais de greffe et les intérêts ;
  • Le droit d’opposition du débiteur, ce qui a pour effet de saisir le Tribunal pour la demande initiale du créancier ;
  • Le délai pour former une opposition ;
  • Le débiteur peut prendre connaissance des documents fournis par le créancier pour le dépôt de sa requête ;
  • L’absence d’autre recours si le débiteur ne fait pas opposition.


Toutes ces mentions sont obligatoires dans l’acte de signification sous peine de nullité de l’acte.


⚠️ L’absence de ces mentions n’entraîne pas la nullité de l’ordonnance, mais simplement de sa signification. Le commissaire de justice peut corriger son acte et le signifier à nouveau dans le délai de 6 mois.

2.2.2 - Comment le délivrer ?

C’est un commissaire de justice qui se charge de signifier l’acte à tous les débiteurs. Lorsque l’ordonnance est signifiée à personne (remise en main propre au débiteur), le commissaire de justice doit lui faire part verbalement de l’acte (article 1414 du CPC). Dans la pratique, cela signifie que le commissaire de justice fait lecture des mentions obligatoires au destinataire de l’acte.

2.3 - Quelles sont ses conséquences ?

Signifier l’ordonnance permet au créancier de demander au commissaire de justice de procéder à l’exécution de la décision, de même qu'un titre exécutoire. Il peut engager toutes les saisies nécessaires pour le paiement de la créance. En effet, désormais, le créancier n’a plus besoin de solliciter le greffe après la signification pour obtenir la formule exécutoire. Elle est apposée immédiatement sur l’ordonnance et évite une seconde signification.

⚠️ l’article 1422 du Code de procédure civile précise toutefois que l’opposition du débiteur est suspensive d’exécution. L’ordonnance ne devient exécutoire qu’à compter de l’expiration des causes suspensives d’exécution.

Par ailleurs, le débiteur obtient un droit d’opposition (article 1412 du Code de procédure civile). Elle est ouverte durant un délai d'un mois suivant la signification de l’ordonnance (article 1416 du Code de procédure civile). 

III - Le jugement rendu suite à une opposition va remplacer l’ordonnance d'IP

Lorsque le débiteur décide de faire opposition à l’ordonnance d’injonction de payer, le Juge convoque les parties et la procédure devient contradictoire. Le Tribunal est saisi de la totalité du litige. Le créancier et le débiteur peuvent exposer leurs arguments à l’oral.

Le jugement se substitue à l’ordonnance d’injonction de payer (article 1420 du Code de procédure civile). Le créancier ne peut plus invoquer cette ordonnance pour faire valoir ses droits.

IV - Quels sont les recours lorsque l'ordonnance IP est réputée nulle ?

Lorsque l’ordonnance d’injonction de payer est frappée de nullité, le créancier peut se tourner vers une autre procédure judiciaire de recouvrement.


Il dispose de trois possibilités : 

  1. Le référé provision ;
  2. L’assignation au fond ;
  3. La procédure simplifiée de recouvrement si le montant de la créance est inférieur à 5 000 €.
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Article de Audrey BERGAMINI
Juriste
Anciennement Clerc d'Huissier & Responsable du Recouvrement. Diplômée d'une Maîtrise en Droit international des affaires, du commerce et droit fiscal obtenue à l'Université Paris-Panthéon-Assas.