Conditions d'une injonction de payer : Quelles sont-elles ?

Conditions d'une injonction de payer :
Thèmes :
recouvrement judiciaire, injonction de payer
Par Bénédicte HONOZON Lu 571 fois Publié le : 03/11/2022 Publié le : 03/11/2022


Après une mise en demeure demeurée infructueuse, en cas de facture impayée inter-entreprises, le créancier peut saisir la juridiction compétente, à savoir le Tribunal de commerce. Il règle les litiges entre commerçants s’agissant notamment de recouvrement de créances. La requête en injonction de payer du demandeur à l’action fait suite à l’échec du recouvrement amiable. Cette procédure contentieuse répond à des conditions spécifiques. Faisons le point sur celles-ci.



L’ESSENTIEL

➜ Ce que dit la loi : les articles 1405 à 1425 du CPC régissent ce recours en justice. Le créancier peut saisir la juridiction compétente pour obtenir du Juge une ordonnance d’injonction de payer, revêtue de la formule exécutoire sans opposition du débiteur. Cette procédure d’injonction ouvre la phase de recouvrement judiciaire

➜ Délai pour agir : le délai pour saisir le Tribunal de commerce est de 5 ans pour les litiges entre commerçants. Le Tribunal judiciaire quant à lui (anciens Tribunaux d’instance et de grande instance selon la valeur du litige) est compétent pour les litiges opposant un créancier professionnel et un débiteur non-professionnel.

➜ Procédure simplifiée : le créancier peut entamer une procédure de recouvrement judiciaire auprès du Tribunal de commerce après avoir tenté vainement de recouvrer la créance de manière amiable. Litige.fr dispose d’un réseau d’huissiers de justice partenaires pour réaliser l’ensemble de ces démarches en ligne en quelques minutes.

INJONCTION DE PAYER EN LIGNE

I - Quelles sont les 3 conditions pour qu'une créance puisse en faire l'objet ?

1.1 - Elle doit être certaine, liquide et exigible

Avant de pouvoir saisir la justice, le créancier doit remplir certaines conditions. La créance doit être certaine, liquide et exigible : 

  • Certaine : son existence ne fait aucun doute. Elle peut être prouvée sans difficultés ;
  • Liquide : elle est déterminée ou déterminable. Les parties connaissent le montant de la créance ;
  • Exigible : la date d’échéance est arrivée ou déjà passée. 

1.2 - La dette ne doit être ni prescrite, ni forclose

Cette créance ne doit pas non plus être prescrite ou forclose. Car, elle pourrait constituer une fin de non-recevoir pour le débiteur. Un avantage pour l’adversaire. 

Une créance est un droit pour le créancier. Elle fait l’objet de prescription, c’est-à-dire qu’elle est encadrée dans un délai pour agir, de cinq ans, en matière contractuelle. La forclusion d'une facture intervient lorsque le délai légal de prescription a été dépassé. 

1.3 - Elle doit avoir une origine contractuelle ou statutaire

Selon l’objet du litige, en vertu de l’article 1405 du CPC, la procédure d’injonction de payer peut-être demandée par le créancier si :

  • La créance litigieuse est de nature contractuelle ou relève d’une obligation de caractère statutaire, avec un montant déterminé ;
  • La créance résulte du tirage d’une lettre de change ou de son acceptation ; d’un billet à ordre, de l’acceptation de la cession de créances... 

II - Quelles sont ses conditions de forme ?

La saisine du Juge dépend de sa compétence et de l’endroit où réside le débiteur poursuivi. La juridiction compétente en matière commerciale est le Tribunal de commerce du lieu où demeure le débiteur, autrement dit l’entreprise cliente au sens des articles 1406 alinéas 1 et 2 du CPC

2.1 - Pour la demande d'injonction de payer formulée par le requérant (créancier)

L’instance est introduite grâce à une requête adressée au greffe du Tribunal par le créancier ou son mandataire. La requête est accompagnée de l’ensemble des documents justificatifs répertoriés dans le bordereau récapitulatif des annexes (article 1407 du code de procédure civile) pour aider le Juge à se prononcer sur le cas qui lui est soumis.

Certaines mentions obligatoires doivent figurer dans sa demande :

  • L’identité du débiteur : 
    S’agissant d’une personne physique (particulier) : le nom et le prénom doivent être mentionnés ainsi que le lieu de résidence
    S’agissant d’une personne morale (entreprise) : la dénomination sociale, le siège social, la forme juridique sont indiqués ;
  • L’identité du créancier et sa domiciliation ;
  • Le montant de la somme litigieuse, le décompte des éléments de la créance, le fondement de cette créance (par exemple un contrat) et le bordereau des documents justificatifs.

📩  Le créancier peut compléter le formulaire Cerfa n°12946*02 prévu à cet effet.

2.2 - Pour l'opposition du débiteur

Le débiteur peut former une opposition en vertu de l’article 1412 du CPC. Il dispose d’un délai d’un mois suivant la signification de l’ordonnance. Sachant qu’une fois que celle-ci sera rendue, le créancier dispose de 6 mois pour signifier la décision au débiteur puisque cette procédure est non contradictoire. Le débiteur n’est donc pas présent à l’audience. ⚠️ L’opposition suspend l’exécution de la décision.

III - Quelles sont ses conditions de mise en œuvre ?

3.1 - Une tentative préalable de recours amiable soldée par un échec

Ce recours judiciaire a l’avantage d’être rapide, toutefois, un recouvrement amiable (mise en demeure...) doit avoir été tenté préalablement par le créancier avant de s'engager dans cette voie contentieuse.

3.2 - Pour le dépôt de la requête d’injonction de payer

Uniquement devant le Tribunal de commerce, le créancier peut la déposer en ligne sur le site Internet du Tribunal digital. La demande d’injonction de payer peut aussi se faire sur format papier adressé alors au greffe du Tribunal selon l'article 1407 du CPC. Il devra produire l’ensemble des pièces utiles à l’étude du dossier et s’acquitter des frais de greffe (environ 33,47 € à payer) dans les 15 jours qui suivent sa requête devant les Tribunaux.

💡En cas de rejet total ou partiel du Juge de la demande du créancier durant la phase d’introduction de l’instance, le créancier peut poursuivre son débiteur selon les voies de droit commun. À savoir le référé-provision ou l’assignation au fond

3.3 - Pour la signification

Si la demande paraît fondée au Juge, il rendra une ordonnance d’injonction de payer. Il revient au créancier de signifier cette décision au débiteur par voie d’huissier sous six mois.

Pour être valable, la signification doit :

  • Faire apparaître clairement les mentions prévues à l'article 1413 CPC et l'article 648 CPC notamment : le délai et les modalités d'opposition, le Tribunal saisit ;
  • Comporter une copie certifiée conforme de la requête assortie du bordereau des documents justificatifs de la dette, ainsi que l'ordonnance revêtue de la formule exécutoire. Ces pièces seront transmises par le commissaire de justice à la partie débitrice dans un coffre électronique accessible sur la plateforme digitale "mespieces.fr" (article 1411 du Code de procédure civile), dont les modalités d'accès seront précisées dans l'acte de signification.

3.4 - Pour l'exécution de l'ordonnance

La contestation de l'ordonnance par le débiteur suspend son exécution. En l'absence d'opposition ou si celle-ci est jugée irrecevable par le Juge et que la partie débitrice ne règle pas sa dette, le créancier doit demander un certificat de non opposition en vertu de l'article 505 CPC (📩 formulaire Cerfa n°12820*02).

Au cours de cette phase, l'huissier de justice va lui transmettre un commandement de payer. Si celui-ci ne règle pas sa dette, des mesures d'exécution forcée pourront être enclenchées.

Photo de Bénédicte HONOZON
Article de Bénédicte HONOZON
Juriste
Diplômée d'un Master 2 de Justice procès et procédures obtenu à l'Université de Perpignan.