Dégradations locatives : Comment faire partir le locataire ?

Dégradations locatives :
Par Kahina KHADRAOUI Lu 6 fois Mise à jour le : 02/08/2025 Publié le : 02/08/2025


Face à un locataire qui dégrade le logement, le propriétaire dispose de recours pour protéger son bien et obtenir, si nécessaire, la résiliation du bail. La procédure, encadrée par la loi, permet d’agir efficacement contre les dégradations volontaires ou la négligence grave. Encore faut-il réunir les preuves et respecter chaque étape.Quand une dégradation est-elle imputable au locataire ? L'article fait le point.

Quand une dégradation est-elle imputable au locataire ?

Une dégradation est imputable au locataire lorsqu’elle résulte d’un usage anormal du logement ou d’un défaut d’entretien. L’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 impose au locataire d’user paisiblement des lieux et de prendre à sa charge l’entretien courant du logement ainsi que les menues réparations.

Contrairement à l’usure normale, qui relève de la vétusté et incombe au propriétaire, les dégradations causées par négligence, malpropreté ou actes volontaires engagent la responsabilité du locataire. Il peut s’agir, par exemple :

  • De revêtements muraux arrachés ou peints sans autorisation ;
  • De sols détériorés par l’humidité ou des objets lourds ;
  • D’équipements cassés par mésusage (robinets, poignées, volets) ;
  • De moisissures dues à un défaut d’aération prolongé ;
  • De dégradations liées à des animaux non autorisés.

L’imputabilité repose sur une appréciation in concreto : il convient de comparer l’état du logement au moment de l’entrée dans les lieux avec son état actuel, à l’aide de l’état des lieux, des photographies et, si nécessaire, d’un constat d’huissier (appelé aujourd'hui « commissaire de justice »).

💡Une annexe au décret n° 87-712 du 26 août 1987 liste les réparations relevant du locataire.

Lorsque la preuve d’une faute du locataire est rapportée, qu’elle soit volontaire ou liée à un manquement à ses obligations, celui-ci peut être tenu de réparer ou d’indemniser le propriétaire. Le dépôt de garantie peut être mobilisé, sans préjudice d’une action en réparation complémentaire.

💡Lorsque les dégradations sont dues à un tiers ou au vandalisme, le locataire n'est, en principe, pas responsable.

Quels sont les recours du propriétaire en cas de dégradations ?

Lorsqu’un logement est dégradé par un locataire, il est possible d’obtenir la résiliation judiciaire du bail, voire l’expulsion. La démarche exige la démonstration de manquements graves aux obligations locatives.

➡️ Pour un modèle de lettre de résiliation, c'est ici.

Un logement rendu insalubre par un défaut d’entretien, l’accumulation de déchets, une humidité excessive, ou des dégradations structurelles causées par négligence peut justifier cette demande (art. 7 de la loi du 6 juillet 1989). Il en va de même lorsqu’il est constaté un usage anormal du bien, portant atteinte à sa destination ou à la sécurité des occupants.

💡Avant toute action, il est indispensable de documenter les désordres : photographies datées, constats d’huissier (commissaire de justice), témoignages de voisins ou de professionnels, devis de réparation. Plus le dossier est rigoureux, plus il facilitera une décision favorable du juge.

Comment faire partir un locataire en cas de dégradations ? 

Pour faire partie un locataire auteur de dégradations, il convient de respecter une série de conditions, en prouvant les dégradations. Le tout peut aboutir à l'expulsion du locataire.

Quelles conditions doivent être réunies pour expulser un locataire pour dégradations ?

L’expulsion d’un locataire ne peut intervenir que si certaines conditions sont réunies. Dans les cas où le locataire ne respecterait pas ses obligations (art. 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989), la résiliation du bail peut alors intervenir, et par la suite, son expulsion.

Ainsi, pour en arriver au stade de la résiliation et de l’expulsion, il ne s’agit pas de simples traces d’usage ou d’usure normale, mais de détériorations dépassant le cadre du quotidien. Par exemple :

Expulser un locataire

  • Un logement laissé dans un état d’insalubrité avancée ;
  • Des équipements volontairement endommagés ou détériorés ;
  • Un entretien courant manifestement négligé.

La persistance du comportement, malgré les avertissements, constitue un facteur aggravant. Une mise en demeure restée sans effet ou une récidive démontrent la mauvaise volonté du locataire et renforcent la légitimité de la demande d’expulsion. Elle se fait au terme d’une procédure judiciaire longue, après commandement de quitter les lieux.

Comment prouver une dégradation du logement ?

Les juridictions exigent des preuves solides pour prononcer la résiliation du bail. Il est donc essentiel de constituer un dossier complet, objectif et factuel. La preuve se fait par tout moyen (art. 1358 du Code civil).

➡️ L’état des lieux d’entrée et de sortie représente une pièce centrale. La comparaison entre les deux documents permet de constater les écarts et d’identifier les détériorations.

Le recours à un huissier de justice (commissaire de justice) est fortement recommandé. Son constat, dressé de manière neutre et détaillée, bénéficie d’une grande force probante devant les tribunaux.

➡️ Des témoignages écrits, signés et datés de voisins, gardiens ou artisans intervenus dans le logement peuvent venir corroborer les observations. Des photos prises dans des conditions précises (avec objets de référence, métadonnées, et ordre chronologique) renforceront le dossier. Les devis de réparation permettent d’évaluer le montant du préjudice subi.

Est-il possible d’expulser un locataire de force ?

Les mesures d’expulsion en droit civil français doivent respecter une série d’étapes qui empêche le propriétaire d’expulser le locataire de force.

L’expulsion forcée d’un locataire ne peut jamais être réalisée sans décision de justice (art. L. 411-1 du Code des procédures civiles d’exécution). Toute tentative d’agir en dehors du cadre légal constitue une voie de fait susceptible de sanctions pénales et civiles (art. 226-4-2 du Code pénal et art. 1240 s. du Code civil).

La procédure passe par une assignation devant le tribunal judiciaire (sauf clause résolutoire qui devra être actionnée avant toute saisine de la juridiction). Le dossier doit comporter l’ensemble des éléments de preuve : photographies, constats, témoignages, devis, etc.

Si les faits sont avérés, le juge peut prononcer la résiliation du bail et ordonner l’expulsion du locataire. L’exécution de la décision est confiée à un huissier de justice, qui peut solliciter l’intervention des forces de l’ordre si nécessaire (article L. 153-2 du Code des procédures civiles d'exécution).

💡la trêve hivernale (du 1er novembre au 31 mars) suspend l’exécution des expulsions, sauf exceptions (art. L. 412-6 Code des procédures civiles d'exécution).

Faut-il envoyer une mise en demeure avant d’aller en justice ?

Une mise en demeure préalable est fortement recommandée. Elle permet d’offrir une dernière chance au locataire de régulariser la situation et démontre la bonne foi du propriétaire.

La lettre doit être envoyée en recommandé avec accusé de réception. Elle doit décrire précisément les désordres, rappeler les obligations contractuelles, et accorder un délai raisonnable pour effectuer les réparations.

ENVOYER UNE MISE EN CAUSE

➡️ Selon la gravité des faits, ce délai peut varier de deux semaines à trois mois. À défaut de réponse ou de correction, cette étape servira de fondement à une action judiciaire.

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Article de Kahina KHADRAOUI
Juriste
Rédactrice de contenus juridiques, diplômée d'un Master 2 universitaire en Droit de l'entreprise.